L'invit� de la semaine
derni�re : Yves Sillard
LES
INVITES DU COSMOPIF
N�300
(lundi 13 d�cembre 2010)
Photo ESA/M. Koell
N� le 27 f�vrier 1978 �
Rouen (Seine Maritime), fils d'une enseignante et d'un professeur
de math�matiques, Thomas Pesquet a suivi toute sa scolarit� � Rouen et obtenu
son baccalaur�at au lyc�e Pierre Corneille en 1998. Il a ensuite int�gr� l'�cole
nationale sup�rieure de l'a�ronautique et de l'espace (Supa�ro) � Toulouse et
s'est sp�cialis� dans les syst�mes spatiaux et
la m�canique des engins spatiaux. Il a
pass� sa derni�re ann�e en programme d'�change � l'�cole Polytechnique de
Montr�al, au Canada. Apr�s un stage chez le constructeur de satellites Thales
Alenia Space � Cannes en 2001, il a d�croch� son premier emploi au sein du
groupe GMV � Madrid en Espagne, travaillant sur des calculs d'orbite de
satellites de t�l�d�tection. En 2002, il a �t� recrut� par le CNES comme
ing�nieur de recherche et a planch� sur
l'avenir de la conception du segment sol europ�en et l'harmonisation europ�enne
des technologies spatiales, devenant repr�sentant du CNES au CCSDS, comit�
consultatif pour les syst�mes de donn�es spatiales. Par
ailleurs pilote priv�, il a �t� s�lectionn� en 2004 par Air France pour
int�grer son programme de formation de pilotes et a pass� durant deux ans
et demi tous les certificats et brevets th�oriques et pratiques pour devenir
pilote sur A320. Il compte � son actif plus de 2 000 heures de vol.
Candidat en mai 2008 � la
troisi�me s�lection d'astronautes de l'Agence spatiale europ�enne, il a �t�
retenu avec cinq autres candidats au terme de 10 mois d'examens
physiques et psychologiques et d'entretiens divers. L'annonce de son entr�e au
sein du corps des astronautes europ�ens -dont il est le plus jeune membre- a
�t� faite en mai 2009. Sa formation initiale d'astronaute
(basic training) s'est ensuite d�roul�e de septembre 2009 � septembre 2010.
Thomas Pesquet est un
sportif aguerri : il est ceinture noire de judo et poss�de une solide
exp�rience en plong�e sous-marine et
en parachutisme. Il pratique �galement le basket, le jogging, la
natation, le squash, le VTT, la voile, le kite surf, le ski et le snowboard. Il
est par ailleurs amateur de voyages (il
pratique d�sormais le fran�ais, l'anglais, l'espagnol, l'allemand et le russe) et de
lecture et joue du saxophone.
Thomas
Pesquet et ses cinq camarades de promotion recevant leur dipl�me
d�astronaute le 22 novembre 2010 au Centre europ�en des astronautes (EAC)
� Cologne.
De gauche �
droite : Jean-Jacques
Dordain (directeur g�n�ral de l�ESA), Thomas Pesquet, Luca Parmitano
(Italie), Alexander Gerst (Allemagne), Samantha Cristoforetti (Italie), Simonetta Di Pippo
(directrice des vols habit�s � l�ESA), Andreas Mogensen (Su�de), Timothy Peake
(Royaume-Uni) et Michel
Tognini (directeur de l�EAC).
Photo ESA/St�phane Corvaja
En fait, je suis tomb�
dedans quand j'�tais tout petit ! C'est une chose qui ne s'explique pas
vraiment car j'�tais le seul comme �a dans la famille ; tout le monde est
enseignant et moi, je ne sais pas pourquoi, c'�tait les navettes spatiales, les
posters, les plan�tes� C'�tait mon truc et mon p�re me construisait des
vaisseaux spatiaux en carton avec plein de cadrans dessin�s dessus ; je ne
voulais plus en sortir ! Mais c'�tait le genre de r�ve qu'on a sans se
dire qu'un jour on y arrivera� jusqu'� ce que j'apprenne que l'ESA cherchait
des astronautes et que je me rende compte que j'avais l'�ge requis ; l�,
je n'ai pas h�sit� une seconde !
Astronaute, pour moi,
c'�tait le travail de r�ve. En postulant, j'avais l'occasion de toucher ce r�ve
de gosse et de m'�panouir encore davantage, avec un travail qui a un but,
quelque chose qui me d�passe un peu et qui repr�sente une v�ritable utilit�
-car je pense que les vols habit�s sont v�ritablement utiles pour la science et
pour les Europ�ens.
Malheureusement, c�est l�accident de la navette Challenger
le 28 janvier 1986 que je retiens. Je suis trop jeune pour avoir suivi les
missions Apollo et je suis de la g�n�ration navette spatiale, un formidable
engin qui m�a fait r�ver durant toute mon enfance. C��tait une r�elle trag�die
aussi � cause de la pr�sence � bord de l'institutrice Christa McAuliffe et du
fait que de nombreux enfants assistaient au lancement. Mais, au final, cet
�v�nement m�a fait prendre conscience que la conqu�te spatiale �tait une
entreprise risqu�e, avec ses zones d�ombre et ses �checs, et que les
astronautes n��taient pas des h�ros de films, dans lesquels tout finit toujours
bien � la fin, mais des �tres de chair et de sang susceptibles de subir le m�me
sort parfois brutal que tout un chacun. C��tait, sans mauvais jeu de mot, un
brusque retour sur Terre pour beaucoup de personnes.
Retenue
parmi 10 000 postulants pour devenir la premi�re institutrice de
l'espace,
Christa
McAuliffe (n�e en 1948) �tait devenue une star nationale aux Etats-Unis
L'ann�e
qui vient de s'�couler a constitu� un moment fort de notre
carri�re et de notre vie. Elle a �t� riche en souvenirs : enseignements th�oriques �
Cologne les syst�mes orbitaux, la robotique ou la m�decine spatiale (nous avons
pass� 1 500 heures en salle de cours : c'�tait un peu l'�cole de
l'espace), entra�nements en piscine, stage de survie en Sardaigne,
apprentissage du russe (nous avons s�journ� un mois inoubliable l'hiver dernier
� Saint-P�tersbourg, alternant les cours intensifs � l'institut le jour et la
vie dans des familles russes le soir)� Ce dernier point a certainement �t� le
plus difficile.
C'est
en tous cas les vols paraboliques qui constituent mon meilleur souvenir car
c'est finalement ce qui se rapproche le plus du vrai vol spatial. La premi�re parabole, elle a �t� pour nous
six : on s'est mis en cercle sur le sol de l'avion, en se tenant tous les
mains, et on a commenc� � s'envoler, dans des grands �clats de rire� Apr�s, on
s'est mis � travailler, � effectuer les exercices qui vous pr�parent �
effectuer les bons gestes quand vous �tes dans l'espace et que tout flotte et a
perdu son poids. C'�tait g�nial !
Photo
ESA
Ce serait la photo de la n�buleuse de l�Aigle prise par le
t�lescope spatial Hubble, d�abord pour sa valeur "artistique" :
c�est une photo magnifique qui encore maintenant fait r�ver des millions de
personnes, ensuite pour sa valeur scientifique : une photo si r�ussie de
ces des colonnes g�antes d'hydrog�ne d'une longueur de plusieurs ann�es lumi�re
illustre parfaitement les immenses capacit�s de cet instrument incomparable
qu�est le HST. Enfin, elle appelle fortement l�imagination et participe du r�ve
spatial : apr�s tout c�est aussi la beaut� et la po�sie de ces mondes
lointains qui nous poussent � l�exploration.
NASA and The Hubble
Heritage Team (STScI)
La r�ponse est facile : je choisis le casque du
scaphandre am�ricain EMU pour les sorties extrav�hiculaires. Il correspond �
l�image d�Epinal des astronautes avec laquelle beaucoup de jeunes gar�ons (et
filles) ont grandi. Cette "armure" rend l�astronaute un peu moins
humain et la rapproche des h�ros de chevalerie par exemple, et en cela elle m�a
fait r�ver pendant ma jeunesse. J�esp�re avoir la chance de participer un jour
� une de ces sorties hors de l�ISS et de flotter dans le vide spatial en
regardant la Terre.
L'astronaute
Michael Gernhardt au bout du bras robotique de la navette Atlantis
lors
de la mission STS-104 en juillet 2001.
Chypre
est visible en arri�re-plan.
NASA
Notre g�n�ration d'astronautes est trop jeune pour avoir connu Youri Gagarine ou les grandes premi�res de la conqu�te spatiale comme le premier pas sur la Lune. Evidemment, en tant que passionn�s, nous les connaissons bien mais sans avoir pu les vivre en direct. Ca repr�sente malgr� tout quelque chose pour nous et en particulier Gagarine, qui marque le d�but d'une �re spatiale, celle des vols habit�s. Ca a une valeur symbolique tr�s forte et on s'en rend bien compte quand on se rend � la Cit� des �toiles pr�s de Moscou, o� l'on croise une statue ou un portrait du premier cosmonaute � chaque coin de couloir�
Mais si je devais d�signer mon astronaute pr�f�r�, je
choisirais plut�t Jean-Fran�ois
Clervoy, que j'avais eu la chance de rencontrer, lui, � une �poque o� je ne
pensais pas que ce soit possible, qui a toujours �t� tr�s ouvert et plein de
conseils. Aujourd'hui, il joue le r�le de grand fr�re avec notre promotion
d'astronaute, nous fait partager son exp�rience et nous guide dans notre d�but
de carri�re.
La Lune est �videmment un objectif qui nous fait r�ver,
d'autant que nous nous sentons tous dans notre �quipe des �mes d'explorateurs,
comme Christophe Colomb � son �poque, comme les explorateurs de l'Antarctique
ou les grimpeurs de l'Everest. C'est ce qui nous porte : nous sommes des
scientifiques, des ing�nieurs et nous souhaitons repousser les limites de nos
connaissances. J'esp�re donc qu'on retournera sur la Lune -�a fait
40 ans-, j'esp�re aussi qu'on ira vers des ast�ro�des, ce sera quelque
chose de scientifiquement extr�mement valable et en terme d'exploration
extr�mement symbolique. A plus long terme bien s�r, j'esp�re que nous pourrons
aller sur Mars -avec la technologie qui va bien�
Merci, Thomas Pesquet !
Interview
r�alis�e en mai-juin 2009 et novembre-d�cembre 2010
Thomas
Pesquet le 20 juillet 2009 � la Cit� de l'espace � Toulouse
(40e anniversaire
du premier pas sur la Lune)
Photo Pif
Interview
lors du Salon international de l'a�ronautique et de l'espace au Bourget le
16 juin 2009
et
rencontre � l'issue de la manifestation "Une journ�e sans satellite"
le 27 novembre 2007
en
compagnie de Thomas
Tsymbal, L�o et Catherine
Lari (organisatrice de l'�v�nement)
Photos St�phane S�bile
et Catherine Lari
Au Centre
europ�en des astronautes � Cologne le 7 d�cembre 2010
en
compagnie de Didier
Capdevila, Axel
Debruyne, Andreas Mogensen,
Timothy Peake, Thomas Tsymbal et Pif
Photo Olivier Lamborelle
La semaine
prochaine (lundi 20 d�cembre 2010) : Frank Lehot