Le pr�c�dent invit� : David Leestma

 

LES INVITES DU COSMOPIF

 

N�388 (lundi 22 avril 2013)

 

Patrick Richon

Ing�nieur-Chercheur au CEA

http://archeovideo.blogspot.fr

 

 

 

Patrick Richon au bord du lac Nyos en 2001

 

 

Qui �tes-vous, Patrick Richon ?

Je suis Ing�nieur-Chercheur au Commissariat � l�Energie Atomique (CEA). Savoyard d�origine (Albertville), j�ai fr�quemment d�m�nag�, avant d�arriver sur Paris en 1993. Passionn� par l�astronautique, l�astronomie, les sciences de la Terre et par tout ce qui vole, j�essaye dans mon m�tier de me rapprocher le plus possible de mes passions. J�y suis parvenu un certain nombre de fois.

 

 

Quel a �t� votre parcours professionnel ?

Mon parcours a �t� plut�t chaotique et c�est arm� d�un BEP Microm�canique-Instrumentation de bord (lyc�e d�horlogerie de Cluses) que j�ai d�but� ma carri�re � l��ge de 19 ans dans les mines d�uranium du Limousin, comme ouvrier fond en charge des tests des instruments de radioprotection d�di�s aux mineurs (COGEMA). C�est l� que je me suis sp�cialis� dans la mesure et la compr�hension des ph�nom�nes physiques li�s au gaz radon-222, gaz radioactif naturel issu de la chaine de d�sint�gration de l�uranium-238. Gr�ce � plusieurs rencontres extraordinaires (dont un ancien chercheur de l��quipe Tazieff) je me suis clairement orient� vers les sciences de la Terre et en 2005 (� l��ge de 40 ans), j�ai eu l�opportunit� de pr�parer et d�obtenir un Master 2 Recherche � l�Universit� de Grenoble (Science de la Terre et de l�environnement, option Terre Solide), qui a imm�diatement �t� suivi d�une th�se en g�ochimie/volcanologie � l�Institut de Physique du Globe de Paris.

Tout au long de ma carri�re, ma sp�cialit� m�a permis de participer � de nombreux programmes et exp�ditions scientifiques, tels que le d�gazage du lac Nyos en 2001 (au Cameroun), la mesure du radon sur les volcans (M�rapi, Taal, Soufri�re de Guadeloupe, Etna, Vulcano etc.) et plusieurs missions d�di�es � l��tude du radon en milieu tectonique (N�pal, Gr�ce, Mongolie). Ce gaz particulier est en effet consid�r� comme un des meilleurs candidats pr�curseur de s�ismes ou d��ruptions volcaniques (possibilit� que j�essaye de confirmer ou de r�futer). Je me suis m�me pos� en h�licopt�re sur le sommet du Mont-Blanc pour y mesurer, devinez quoi, le radon bien s�r ! C�est pour l�essentiel ma th�matique de recherche depuis 1992 au CEA.

Je d�taille mon parcours afin que les plus jeunes, en possession ou en pr�paration d�un BEP (ou �quivalent), sachent que tous les espoirs sont permis, avec un peu de volont� et beaucoup de passion, rien n�est jou� d�avance, on peut changer son parcours professionnel radicalement afin qu�il se rapproche du m�tier que l�on r�ve de faire. Croyez-moi, presque tout est possible, il suffit d�y croire !

L��tude du radon-222 peut paraitre �loign�e du domaine spatial, comme je le pensais moi-m�me du fond des mines d�uranium, sachez qu�il n�en est rien car, lors des missions Apollo 15 et 17, plusieurs instruments d�di�s � sa mesure ont �t� embarqu�s � bord des deux modules de commande. Ils ont ainsi d�tect� � la surface de la Lune des zones pouvant �tre le si�ge d�un d�gazage actif (r�sultats qui sont encore discut�s). M�me les sondes Surveyor ont mesur� indirectement les flux de radon � la surface de la Lune. Plus r�cemment, a sonde Lunar-Prospector et la sonde KAGUYA (Selene) ont elles aussi embarqu� des d�tecteurs radon.

L�int�r�t du radon-222 appliqu� � la plan�tologie est toujours d�actualit� (�tude de l�atmosph�re de Mars, de la Lune), c�est pourquoi, depuis une dizaine d�ann�e, je suis int�gr� � un petit groupe de r�flexion (IRAP, IRSN et CEA) qui a pour objectif de concevoir et d�envoyer un de nos d�tecteurs � la surface de Mars ou de la Lune. Les places disponibles sur ces diff�rentes missions plan�taires �tant tr�s convoit�es, pour l�instant, notre projet n�a pas encore �t� s�lectionn� mais nous gardons bon espoir car la mesure du radon-222, tr�s sensible (on sait mesurer un atome de radon-222) est un tr�s bon traceur de l�atmosph�re, des ph�nom�nes de d�gazage et indirectement du volcanisme des plan�tes �tudi�es.

 

 

Quelle est votre passion, comment est-elle n�e, comment la vivez-vous ?

Ma passion, comme vous vous en doutez, concerne l�astronautique mais aussi l�astronomie (je suis astronome amateur). Elle est n�e lors de la mission Apollo-Soyouz et lors des missions Viking (toute les deux en 1975) j�avais 10 ans. C�est l� que j�ai red�couvert l��pop�e d�Apollo 11, qui pour moi repr�sente l�ultime exploration moderne. Depuis cette date et jusqu�� l��ge de 20 ans, j�ai collectionn� tous les articles de presse traitant des missions spatiales. Je dois, sans aucun doute possible, ma carri�re scientifique � cette passion de l�exploration spatiale.

Je dois avouer que tout au long de ma carri�re, j�ai cherch� � obtenir les dipl�mes me permettant de d�poser ma candidature comme astronaute � l�ESA. Un peu tardivement, en mai 2008, l�opportunit� s�est pr�sent�e et j�ai postul�, je remplissais enfin toutes les conditions (enfin presque) pour �tre dans les 8 400 candidats s�lectionnables, mais je n�ai malheureusement pas d�pass� la premi�re s�lection, �limination surement imputable � mon �ge avanc� (sourire). Mais pour moi l�essentiel est de me dire : je l�ai au moins tent�. Et j�aime penser, en regard de la formation universitaire d�Alexander Gerst (s�lection 2009), que mon profil n��tait finalement pas trop �loign� de ceux exig�s pour cette s�lection (il est volcanologue de m�tier).

Depuis maintenant 4 ans, j�exprime ma passion en me plongeant dans toutes les anciennes vid�os de l�aventure spatiale, vid�os issues des programmes am�ricains ou russes. Internet offre une banque de donn�es illimit�e et me permet de r�cup�rer des vid�os en HD. A partir de ces documents film�s, j�ai eu l�id�e d�essayer de construire des images in�dites (plus particuli�rement des panoramas), d�en augmenter la r�solution, d�en corriger les d�fauts pour finalement pr�senter sur mon blog le r�sultat de ce travail qui peut �tre long et fastidieux. J�aime assembler et d�couvrir, en fin de traitement, un angle original de l�aventure spatiale. J�ai une petite pr�f�rence pour les films 16 mm et les vid�os des cam�ras de t�l�vision embarqu�es sur les missions Apollo. Le terme que j�ai cr�� pour d�crire au mieux ce que je fais est l�Arch�ovid�o. Petite fiert� personnelle, la premi�re image que j�ai r�alis�e de cette fa�on sur les Sept de Mercury a �t� choisie par Scott Carpenter pour la page d�accueil de son site. Une de mes images pr�f�r�es et r�alis�es � partir de cette m�thode est celle d�Apollo 17, en orbite terrestre, juste avant l�amarrage au module lunaire.

 

 

Quelle anecdote personnelle ou souvenir fort li� � la conqu�te spatiale souhaiteriez-vous nous faire partager ?

J�en trois anecdotes � vous livrer. La premi�re, sans aucune h�sitation, est ma rencontre avec Buzz Aldrin lors de la premi�re du Film Fly Me to The Moon au MK2 Biblioth�que de Paris en octobre 2008. Profitant d�un moment o� il �tait seul, j�ai pu lui serrer la main, lui parler deux minutes et il a gentiment accept� de poser avec moi pour une photo. Je n�oublierai jamais cette journ�e et l�intensit� de son regard, qui quand vous le croisez, vous fait comprendre rapidement pourquoi il a �t� l�un des premiers hommes � fouler le sol de la Lune.

 

 

Buzz Aldrin et le r�alisateur Ben Stassen de Fly Me To The Moon au MK2 le 19 octobre 2008

Photo St�phane S�bile

 

 

Ma deuxi�me anecdote concerne Roger Maurice Bonnet (� l��poque Directeur des programmes scientifiques � l'Agence spatiale europ�enne) qui, suite � une lettre de candidature que je lui avais faite parvenir (4 pages !) et intrigu� par mon parcours, m�avait invit� et re�u pendant plus de 2 heures dans son bureau au si�ge de l�ESA � Paris. Cette rencontre reste pour moi un moment m�morable et les conseils qu�il m�a promulgu� tout au long de cet entretien me servent encore aujourd�hui.

La troisi�me est plus r�cente, gr�ce � un ami chercheur, j�ai pu tenir dans mes main une �prouvette contenant moins d�un gramme de poussi�re lunaire, rapport� par les missions Apollo, quelle �motion en regardant ces quelques grains charg�s d�histoire�

 

 

Quelle serait votre photo spatiale ou astronomique pr�f�r�e et pourquoi ?

Je choisis cette photo de Buzz Aldrin dans le module lunaire Eagle lors de la mission Apollo 11. L�expression de son regard semble nous dire : � Je suis tr�s fier et heureux d��tre l�, dans le plus extraordinaire des vaisseaux, pour la plus extraordinaire des missions�Je me suis battu pour �tre l� mais, vous qui me regardez, vous faites partie du voyage� �

 

 

 

De la m�me mani�re, quel objet spatial vous fascine-t-il ?

L�objet qui repr�sente pour moi un des plus grands d�fis d�ing�nieur est le module lunaire. Cette araign�e extraordinaire a parfaitement rempli sa mission, en d�posant et en ramenant sains et saufs et sans aucune difficult� les premiers marcheurs lunaires. Pour cet engin, il fallait tout r�inventer, quelle aventure extraordinaire ont d� vivre les ing�nieurs et techniciens de Grumman, sous la direction de Tom Kelly, un des cr�ateurs de cet extraordinaire vaisseau !

 

 

Le LEM � Challenger � de la mission Apollo 17

 

 

Que vous �voque le vol de Youri Gagarine ?

Le vol de Gagarine repr�sente pour moi une prise de risque �norme. Je ne sais pas s�il avait pleinement conscience des dangers de l�aventure. Mais, en tous cas, par son courage, l�homme a quitt� notre atmosph�re et il restera pour toujours le premier � l�avoir os�.

 

 

Quel souvenir gardez-vous de la nuit du 20 au 21 juillet 1969 ?

Je n�avais que 4 ans � cette �poque et, honn�tement, je ne sais plus si je me suis reconstruit le souvenir ou si l�image que j�en garde est bien r�elle. Mais, d�apr�s mes parents, lors de cette fameuse nuit, ils nous ont r�veill�s, mon fr�re et moi, pour aller chez le voisin qui �tait le seul � poss�der une t�l�vision. Je n�ai que le souvenir de ce r�veil inhabituel, de cette boite lumineuse en noir et blanc et de la pr�sence de nombreuses personnes tass�es dans ce salon� A l�inverse, je me souviens tr�s bien de la mission Apollo-Soyouz (1975) et du premier d�collage de la navette spatiale en 1981 (mon coll�ge m�avait autoris� � � s�cher � une journ�e d��cole pour que je puisse suivre cet �v�nement en direct).J�avais m�me film� en Super 8 le d�collage, film que je poss�de toujours.

 

 

Quel serait votre r�ve spatial le plus fou ?

J�aimerais marcher sur la Lune tout simplement mais le tourisme spatial n�en est pas encore l�� et quand bien m�me, je ne suis pas s�r que j�en aurais les moyens� Mais bon, qui sait, ils auront peut-�tre besoin d�y mesurer le radon, non ?

 

 

Merci, Patrick Richon !

 

Interview r�alis�e par mail en f�vrier 2013

 

 

 

Le prochain invit� (lundi 6 mai 2013) : Mike Foreman

 

 

 

 

 

 

Les coordonn�es des invit�s ne sont communiqu�es en aucun cas

 

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